Type et date de soutenanceSoutenance de thèse

Le Primitivisme au Japon du modernisme à nos jours. Quel critère pour le "beau" : être "in" ou "out" de l'histoire des arts non occidentaux

Rena Kano

Résumé

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À la différence des sociétés occidentales, où la modernisation fut un processus lent et progressif, la modernisation culturelle du Japon s’est opérée brusquement, via une occidentalisation, lors de l’ouverture du pays au monde dans les années 1860 – le Japon exprimant alors sa volonté d’être considéré comme un État moderne. Témoin de cette reconnaissance, il est invité en 1873 comme nation exposante à l’Exposition universelle de Vienne et convié à y présenter, entre autres signes de sa civilisation, son « art ». Or, les Japonais n’en possédaient alors ni le concept ni le mot. Ils ont donc d’abord cherché à traduire le mot. Ils ont choisi le terme de bijutsu : « technique ou magie du beau ». Le pays crée ensuite son École des Beaux-Arts, où l’on est censé enseigner l’« art » et son histoire, ce qui amène les Japonais à repenser tout leur passé de création de formes sous le prisme du critère « universel » de l’Occident. Dans leur production esthétique, ils ont ainsi dû trier entre ce qui pouvait être intégré dans l’« art », et ce qui devait, au contraire, en être éliminé. Ils ont dû également modifier leurs présupposés concernant l’idée de création humaine.   L’objectif de ce travail est de retrouver, au-delà ou en deçà de cette transformation, une des valeurs d’ordre esthétique spécifiquement japonaise équivalente à la notion occidentale du « beau », et qui s’est vue ainsi mise de côté. Cette part oblitérée de la production esthétique du Japon constitue ce que nous appelons son avant-art ; et nous le voyons structuré par un mécanisme original, le mitate. Parmi les productions de cet avant-art primitiviste, nous nous attachons plus particulièrement dans cette thèse au domaine, exclu de l’« art », de la poupée ou statuaire anthropomorphique, afin de tenter d’élucider cet intraduisible japonais. Aujourd’hui encore, on trouve au Japon, dans les productions esthétiques labellisées telles et dans certains produits culturels industriels, des rémanences de cette conception initiale typique, et nous en étudions les modalités. Nous analysons ainsi la recherche dans le mitate du « semblant de réel », qui, en dépit d’une similitude de surface, diffère du réalisme occidental, sur des exemples de créations anthropomorphiques japonaises anciennes et récentes. Et, au travers de celles-ci, nous examinons comment la fonction du mitate a changé du début de l’ère moderne à la période contemporaine. Dans le cadre d’une anthropologie de l’art, cette thèse ambitionne d’illustrer à quel point, sous sa modernisation/mondialisation, la culture des formes au Japon repose sur des bases singulières, à la fois, en partie, très anciennes et toujours actives.

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Jury

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  • M. Carlo Severi (Directeur de thèse), EHESS
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  • Mme Joyce Cheng, Oregon University
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  • Mme Claude Imbert, ENS Paris
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  • Mme Isabelle Kalinowski, CNRS
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  • M. Christophe Marquet, EFEO
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  • M. Germain Viatte, Musées de France
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