Equipe / Relations hommes/animaux : questions contemporaines

Responsables

Carole Ferret et Frédéric Keck

Composition de l’équipe

Chercheur.e.s du LAS : A.-M. Brisebarre, C. Ferret, F. Keck, C. Stépanoff, N. Vialles

Chercheur.e.s extérieur.e.s associé.e.s : H. Artaud, A. Doré, S. Dupé, M. Grisotti, V. Manceron, J. Michalon, M. Roué, S. Ruhlman, C. Sautchuk, J. Trinquier.

Doctorant.e.s et post-doctorant.e.s : L. de Boisseuil, N. Bureau, S. Cabalion, J. Carreira, H.-Yen Dam,

P. Drugeon, N. Lainé, C. Marchina, A. Morvan, B. Picard, I. Teixeira.

Les travaux de cette équipe visent, depuis sa création en 2010, à comparer les relations entre  humains et animaux dans différentes aires culturelles, en fonction de distances plus ou moins longues  entre humains et animaux, et sur des échelles de généralité variables. Sont donc interrogées les  frontières entre le sauvage et domestique, entre nomades et sédentaires, entre animaux de  compagnie et animaux d’élevage, entre protection des espèces menacées et contrôle des  populations animales. Sont également étudiées les transformations de ces relations du fait de  quelques grands phénomènes contemporains : libéralisation économique, pandémies virales,  pollutions toxiques, réchauffement climatique… La question générale qui rassemble les membres de  l’équipe peut être formulée ainsi : quelles sont les différentes techniques par lesquelles les hommes  surveillent les animaux (protection, soin, contrôle, prévention, préparation) ? Comment cette  surveillance s’organise-t-elle en fonction des différentes frontières qui déterminent les relations entre  humains et animaux ? L’équipe organise un séminaire mensuel, au cours duquel sont présentés et  discutés les travaux de chercheur.e.s sur ce domaine. Lors de ces séances, deux interventions traitent  d’un thème, d’une espèce animale, ou d’une discipline particulière et les débats rendent compte  d’une pluralité d’approches théoriques. L’équipe a participé à des ouvrages collectifs et des  colloques sur les relations hommes-animaux (Carole Ferret & Camille Noûs, « Le “tire-bouc”, un jeu centrasiatique bien peu touristique » Mondes du tourisme, 2020 ; Frédéric Keck et Arnaud Morvan,  Chauves-souris. Rencontres aux frontières entre les espèces, Paris, CNRS Éditions, 2021). Un volume  de la collection du laboratoire, les Cahiers d’Anthropologie Sociale, a été dirigé par deux jeunes  chercheures du LAS en 2018 (Primates, dirigé par Lys Alcayna Stevens et Hiav Yen Dam).

L’un des coordinateurs de l’équipe, F. Keck, est titulaire de la chaire « Anthropologie européenne  des relations entre humains et animaux » à l’École Normale Supérieure / EUR Translitterae. Il mène  depuis son entrée au LAS en 2009 une recherche sur les zoonoses (maladies infectieuses transmissibles  aux frontières entre les espèces) et leur gestion biopolitique globale. À partir d’enquêtes sur la gestion  de la grippe aviaire et du SRAS à Hong Kong et dans le sud de la Chine menées entre 2007 et 2013,  il propose une approche comparée en mobilisant les concepts de l’anthropologie de la nature,  notamment ceux de prédation et d’accumulation, pour décrire le travail des « chasseurs de virus »  qui font des prélèvements sur les animaux (oiseaux sauvages, volailles domestiques, chauves-souris)  et les conservent dans des laboratoires. Ses recherches portent ainsi sur les normes de biosécurité  appliquées aux animaux et aux humains dans l’anticipation des pandémies, comme l’abattage, le  confinement, la vaccination, la simulation et la perception de signaux d’alerte précoce par des  sentinelles. Il contribue ainsi à élaborer une réflexion sur l’approche « One Health » qui relie santé  humaine, santé animale et santé de l’environnement avec de nombreux collègues anthropologues,  virologues, vétérinaires et écologues au niveau international.

Les activités de l’équipe « Relations hommes-animaux » s’articulent étroitement avec des  programmes de recherche ambitieux qui ont permis de financer des jeunes chercheur.e.s et  d’accroître la visibilité du LAS à l’échelle nationale et internationale. Plusieurs programmes de  recherches pilotés par Frédéric Keck sont consacrés à la thématique des zoonoses et des relations  inter-espèces, et font intervenir un réseau de collaborateurs internationaux (anthropologues,  microbiologistes, géographes, sociologues) :

Le premier programme, financé par le Fonds Axa pour la recherche (2013-2018), s’intitule  « Représentations sociales des pathogènes aux frontières entre les espèces » et vise à comparer les  perceptions et les représentations des pathogènes passant des animaux aux humains dans des  sociétés et aires culturelles différentes. À partir de crises sanitaires qui touchent les élevages  traditionnels ou industriels, il étudie les façons dont les éleveurs, et plus généralement ceux qui vivent  en contact avec les animaux, assimilent des mesures de santé publique souvent coûteuses pour  l'économie rurale. L’hypothèse, soumise à l'épreuve du terrain, est que les rapports de proximité et  de distance entre les humains et les animaux ne dépendent pas du seul facteur écologique, mais  aussi de représentations des rapports entre humains et non-humains. Cette anthropologie  comparative des zoonoses vise donc à la fois une participation aux mesures de santé publique et  un renouvellement de questions théoriques sur les relations entre humains et animaux. 

Un second programme financé par le Domaine d’Intérêt Majeur DIM1HEALTH s’intitule « Indigenous  knowledges and biosecurity measures: Perceptions and uses of bats in the context of zoonotic risks  in Australia and Europe » (2018-2020). Il vise à comprendre comment les populations indigènes  australiennes ont évolué avec les chauves-souris pendant des milliers d’années sans être affectées  par divers virus émergeant des réservoirs de chauves-souris. Il compare les perceptions et les  utilisations autochtones des chauves-souris avec d’autres pratiques similaires dans la région Asie-  Pacifique et en Europe. Accueillie par le LAS et le LESC et s’appuyant sur une collaboration entre  microbiologistes, géographes et chercheur.e.s en sciences sociales de l’Université de Melbourne,  cette recherche en anthropologie des relations inter-espèces met en lumière l’une des énigmes de  l’immunologie contemporaine, le rôle des chauves-souris en tant que réservoirs de maladies  infectieuses émergentes, à travers le point de vue des populations indigènes, ouvrant ainsi des  perspectives sur les avantages et les limites des connaissances indigènes locales dans le cadre du  paradigme « One Health » (une seule santé).

Le programme RegWet (« Regulating Wetmarkets in Central China : Ethnographic Study of the  Perception of Zoonotic Risks after the Covid-19 Crisis », 2020-2023), financé par l’ANR, rassemble un  consortium de socio-anthropologues français et chinois qui étudie l’impact de la crise du Covid-19  sur la régulation des marchés humides en Chine centrale. Il évalue comment les autorités chinoises  régulent l’économie des marchés humides et comment les détaillants et les consommateurs  réagissent à ces mesures autour de la région de Wuhan, lieu d’émergence du nouveau coronavirus  transmis par les chauves-souris aux animaux vendus pour la consommation humaine. L’objectif est  de comprendre comment le Covid-19 a modifié la perception des risques zoonotiques dans les zones  urbaines où les consommateurs peuvent acheter des animaux sauvages.

Le programme intitulé « Construction of freshness and regulation of zoonotic risks in Chinese  wetmarkets after Covid-19 » (2021-2024), financé par le Domaine d’Intérêt Majeur DIM1HEALTH, porte  sur les « marchés humides », marchés très populaires où les animaux sont vendus vivants. Ce projet  vise à décrire la construction sociale de la fraîcheur dans les interactions quotidiennes entre les  clients, les détaillants, les superviseurs et les urbanistes dans les villes chinoises contemporaines, où la  pression pour introduire des chaînes de froid standardisées est de plus en plus forte.

Le programme « Biodiversité dans les terres australes françaises » (2021-2024) financé par le CNRS,  porte sur la réserve naturelle nationale des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). Dans le  cadre des engagements pris par la France lors de la COP21, cette zone est étudiée comme un  écosystème particulièrement vulnérable au changement climatique, notamment à travers la pose  d’antennes GPS sur les espèces marines. Le problème est donc de déterminer comment les  scientifiques peuvent connaître cet écosystème sans trop le modifier. Une gouvernance spécifique  s’est construite pour les TAAF avec un préfet contrôlant l’exploitation des ressources naturelles. Ce  projet vise à éclairer les décisions prises par cette gouvernance à partir de deux normes  apparemment contradictoires : la biodiversité et la biosécurité. Un autre programme, intitulé  Ecopaths (2021-2025), financé par l’ANR, s’inscrit dans la continuité de ce projet sur la biodiversité  dans les terres australes françaises.

Le programme Human & Microbiome (2019-2026) financé par le Canadian Institute for Advanced  Research (CIFAR) réunit des microbiologistes et des anthropologues et porte sur l’étude du microbiome  précolonial. Il vise à établir le rôle du microbiome dans l’évolution et le développement  humain, et réciproquement le rôle des changements dans les pratiques humaines (alimentation,  domestication, vieillissement…) sur le microbiome. À partir de l’étude des restes humains contenus  dans les musées, le projet essaie de faire une histoire environnementale de la colonisation à partir  des microbes contenus dans ces restes précoloniaux.  D’autres collaborations scientifiques internationales ont émergé depuis 2017. Frédéric Keck est  membre de 2 programmes ERC portés par le Département d’anthropologie de l’Université de Saint-  Andrews (ERC « Global War Againt the Rat », 2018-2023) et de l’Institut d’ethnologie, Académie des  Sciences de Prague (ERC BOAR : « Veterinarization of Hunting after African Swine Fever », 2019-2024).

Enfin, le programme ANR LifeChange (2017-2022), dont Charles Stépanoff est l’un des partenaires,  porte sur le déchiffrement des conséquences biologiques et pathogéniques liées à un changement  majeur de mode de vie. Il vise à éclairer les rapports entre mode de vie et santé chez les peuples  indigènes de Iakoutie (Sibérie orientale). Plusieurs communautés ont été étudiées : urbains, éleveurs  de rennes, chasseurs-pêcheurs. Le projet s’appuie sur une approche transdisciplinaire visant à tirer  parti d’un registre archéologique exceptionnel, des meilleurs outils de génomique évolutive et  d’enquêtes sociales approfondies sur le terrain. Les profils (épi)génétiques de plusieurs centaines  d’individus actuels présentant des modes de vie et conditions sociales contrastés sont caractérisés  à l’échelle des génomes entiers à l’aide d’outils de séquençage à très haut débit et de génotypage. Ils sont ensuite comparés à ceux d’une centaine d’individus anciens datant du 15e  au 19e siècle,  obtenus à l’aide de technologies de pointe dans le domaine d’analyse des ADN anciens.